1) Le titre vous est venu avant ou après la rédaction du manuscrit ?
À vrai dire, le titre m’est venu en cours d’écriture. À mesure que l’histoire se précisait dans mon
esprit, il s’est imposé comme une évidence. En observant peu à peu la dynamique qui s’installait
entre les personnages principaux, j’ai perçu une relation tripartite forte, presque symbolique.
Cela m’a naturellement conduit à m’inspirer de la formule bien connue de la Trinité : « le Père,
le Fils et le Saint-Esprit ». C’est ainsi qu’est née l’idée du titre, en écho direct à cette
construction narrative.


2) Racontez-nous le processus d’écriture. Utilisez-vous un ordinateur ?
Contrairement à ce que d’autres pourraient vous dire, je suis incapable d’écrire sur du papier.
Plus maintenant. Mon processus est résolument numérique. La plupart du temps, j’esquisse mes
premières idées sur l’application Notes de mon iPhone, au fil de l’inspiration. Ces éléments sont
ensuite transférés sur Google Docs, où je commence à structurer davantage le texte. Pour la
phase de finalisation et les dernières retouches, j’utilise alors mon ordinateur, qui devient mon
principal outil de travail.


3) Quel est votre personnage préféré ? Pourquoi ?
Si je devais choisir un personnage parmi ceux que j’ai créés, ce serait sans hésiter Lafraîcheur
Dandy, le protagoniste de mon livre EXceptionn’Elles. Avant ma rencontre avec mon épouse,
j’ai, d’une certaine manière, incarné ce personnage dans ma propre vie.
Cela dit, en élargissant au-delà de mes écrits, le personnage qui me touche le plus reste Edmond
Dantès, du Comte de Monte-Cristo. Il résonne profondément en moi, notamment parce qu’il
symbolise, avec intensité, cet attrait complexe que j’ai toujours ressenti pour l’idée de vengeance.


4) Sur quelles bases, choisissez-vous le nom des personnages ?
Lorsque je choisis le nom de mes personnages, je m’efforce de faire preuve d’originalité tout en
veillant à ce qu’il reflète parfaitement leur tempérament. Le nom doit, à lui seul, éveiller chez le lecteur une première impression du personnage. Par exemple, Lafraîcheur Dandy dans EXceptionn’Elles, ou encore Ti Jérémie et Charlot dans mon dernier roman publié : dès que l’on
entend ces noms, on pressent immédiatement l’univers, l’attitude ou la personnalité auxquels ils
renvoient.


5) Avez-vous lu la version publiée ?
À vrai dire, je n’ai pas encore lu la version publiée dans son intégralité. Avant la soumission du
manuscrit, je procède à une ultime relecture attentive, suivie d’un rapide contrôle après
impression pour m’assurer que tout est conforme aux attentes. Mais, de manière générale, je
préfère ne pas me replonger dans mes propres récits une fois qu’ils sont édités. Il m’arrive même
d’oublier certains détails de l’histoire, que j’ai le plaisir de redécouvrir à travers les échanges
passionnés avec mes lecteurs.

L’auteur

6) Quels sont les thèmes forts de votre roman ?
Les thématiques majeures de ce roman tournent autour de la quête de responsabilité, de rédemption et de la confrontation avec ses propres failles. L’un des fils conducteurs est l’idée que les choix individuels, même les plus personnels, ont des répercussions sur la famille et, par extension, sur la société. À travers les personnages, j’explore la manière dont les secrets, la honte et les erreurs peuvent ronger l’individu et l’empêcher de faire face à sa propre vérité.
Une autre thématique centrale est celle du poids des exigences sociales. Les personnages se trouvent souvent tiraillés entre leurs propres désirs et les attentes extérieures. Cela les conduit à des dilemmes moraux et à une crise d’identité qui les pousse, parfois, à se perdre dans les illusions d’un monde où l’apparence prime.
Enfin, il y a une réflexion sur la rédemption et le salut. Je crois profondément en la possibilité de se relever, même après les pires erreurs. Ce roman, au-delà de ses éléments de suspense, est aussi un appel à la conscience de chacun, à la nécessité de faire face à ses responsabilités et à la possibilité d’un renouveau, quel que soit le poids du passé.
La force de l’amour est aussi une thématique non négligeable développée à travers la narration,
mais je laisse cette dernière aux bons soins du lecteur.


7) À quel moment, vous êtes-vous senti prêt à présenter le travail au public ?
Je crois que l’écriture d’un roman n’est jamais véritablement achevée. À chaque relecture, une
nouvelle manière d’améliorer ou de conclure l’histoire semble se dévoiler. Pour ma part, je
considère qu’un livre est prêt à être présenté au public lorsque je ressens une forme de lassitude à
vouloir le peaufiner. C’est à ce moment-là que je sais qu’il est temps de le confier aux regards,
aux critiques et aux appréciations des lecteurs.


8) Pourquoi devons-nous lire votre roman ?
Dans le contexte sociopolitique haïtien actuel, où l’irresponsabilité semble érigée en norme et où
l’on assiste à une démission presque généralisée face aux dérives de la société, ce roman se veut
un appel à la conscience individuelle et collective. Il interpelle sur cette absence flagrante de
accountability, pour employer un terme anglo-saxon qui traduit mieux que tout autre cette
exigence de répondre de ses actes. Il rappelle que toute société en crise est d’abord composée
d’individus en fuite devant leurs responsabilités.
Si ce roman offre une pluralité de lectures et de réflexions, selon la sensibilité de chacun, le
message central que je souhaite transmettre tient en une phrase empruntée à Joël Dicker, dans
une œuvre qui m’a profondément marqué : « La vie est une succession de choix qu’il faut savoir
assumer ensuite ». Cette maxime résume à elle seule toute la trame de Au nom du père, du fils et
des saints-martyrs
, où chaque personnage se confronte, tôt ou tard, aux conséquences
irréversibles de ses décisions.
Au nom du père, du fils et des saints-martyrs se distingue de mes précédents ouvrages par une
écriture plus mature et introspective. Les thèmes abordés sont plus diversifiés, et j’ai voulu
m’éloigner des sentiers battus pour explorer des dimensions plus profondes et parfois plus
sombres de l’être humain. Ce roman est marqué par une dimension dramatique qui cherche à
interroger, à émouvoir, plutôt qu’à divertir ou à amuser, comme c’était le cas dans mes deux
précédents livres.
Il y a une volonté de pousser le lecteur à une réflexion plus intense sur des questions de responsabilité, de société et de rédemption. Contrairement aux précédents ouvrages, où l’écriture avait une tonalité plus légère, Au nom du père, du fils et des saints-martyrs ne cherche pas à simplement raconter une histoire, mais à plonger dans les abysses de l’âme humaine, à provoquer une confrontation avec les choix et les conséquences.


9) Notez votre travail sur 10.

L’auto-évaluation est toujours un exercice délicat et rarement totalement objectif. Cela dit, je suis
particulièrement satisfait de l’évolution de mon écriture. La maturité dont j’ai fait preuve dans
cette nouvelle publication mérite, selon moi, une note de 7 sur 10. Comparé à mes précédents
ouvrages, celui-ci représente incontestablement un progrès. Toutefois, je reste convaincu que le
meilleur est encore à venir !


10) Mémoires d’un trépassé ou Au nom du père, du fils et des saints-martyrs ? Pourquoi ?
Le premier ouvrage publié garde toujours une place particulière, comparable à celle d’un
premier-né : il reste unique et spécial. Cela dit, Au nom du père, du Fils et des saints-martyrs est
une œuvre qu’il faut absolument découvrir. Cette nouvelle publication porte en elle une force et
une maturité qui, je l’espère, sauront captiver autant qu’émouvoir les lecteurs.

Clauvell Junior Louis Jean est diplômé en Lettres modernes de l’École Normale Supérieure de l’Université d’État d’Haïti, il détient un master en Littérature et Transculturalité. En 2018, il publie Mémoires d’un trépassé, suivi en 2020 de EXceptionn’elles. Il participe ensuite à l’ouvrage collectif Haïti face à la COVID-19, paru chez C3 Éditions. Au nom du Père, du Fils et des saints-martyrs, paru aux Éditions Julien Hilaire, est son dernier titre.

Carlile Perrin
Carlile Perrin Magazine

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